Tomates de serre biologiques : le dessus du panier
Centre d'agriculture biologique du Canada
L’industrie du légume de serre occupe une place vitale et grandissante dans l’agriculture canadienne, avec une valeur à la ferme de 2,3 milliards en 2007, plus récente année pour laquelle des statistiques sont facilement disponibles. Les Canadiens aiment les tomates, concombres, poivrons, herbes et autres végétaux cultivés en serre toute l’année par des exploitations situées un peu partout au pays.
La plupart de ces végétaux sont produits par des systèmes culturaux « conventionnels », c.‑à‑d. non biologiques. Certains producteurs, cependant, intéressés par le potentiel de revenu d'une mise en marché sélective et par l’idée de progresser en tant que gestionnaires environnementaux, se tournent vers la production biologique en serre (serriculture biologique), particulièrement pour la tomate, légume de serre le plus commun.
Des chercheurs de la Grappe scientifique biologique du Canada (GSB) travaillent au développement d’un système de culture biologique en serre respectueux de l’environnement, économe en énergie et rentable, afin de faire pousser des tomates biologiques.
L’équipe inclut des scientifiques de centres québécois et britanno‑colombiens d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, des professeurs et chercheurs des universités Laval et McGill et de l’Université de Montréal et des chercheurs qui collaborent au projet en Israël et en Suède, en plus de nombreux partenaires de l'industrie.
Un certain nombre d’objectifs ont été fixés pour ce projet ambitieux d'une durée de trois ans. Comme les exploitants agricoles, les serriculteurs cherchent constamment des moyens d’accroître l’efficacité de l’irrigation et de la fertilisation. Ils sont très enthousiastes à l’idée d'augmenter leurs rendements en culture de tomates savoureuses et nutritives, tout en allégeant leur empreinte écologique, grâce à la réduction des émissions d'éléments nutritifs par ruissellement dans la terre et les nappes d'eau environnantes.
Les chercheurs de la GSB étudient des méthodes d'optimisation de l'apport de nutriments pour que les cultures utilisent au mieux les fertilisants appliqués. Ils comparent un système « conventionnel » et un système biologique : des plants conventionnels sont cultivés avec des solutions de nutriments courantes dans les exploitations de serres non biologiques d'une part, et des plants biologiques poussent dans un milieu de croissance certifié sous un régime de fertilisation biologique d'autre part.
De nombreux producteurs recyclent leurs solutions nutritives pour économiser de l’eau et des fertilisants et diminuer leur empreinte écologique. Ils doivent cependant désinfecter ces solutions avant de les réutiliser. L’équipe de recherche va recueillir la solution utilisée dans ses expériences et la redonner à ses cultures de tomates sans traitement préalable ou après filtration par des marais.
Lorsque les végétaux sont produits en serre par des systèmes culturaux biologiques ou non biologiques à base de terre, des problèmes de ruissellement de nutriments dans les eaux souterraines voisines peuvent surgir. Les serriculteurs sont préoccupés par ces problèmes et cherchent différents moyens de les éviter ou de les atténuer. L’utilisation de plantes sauvages ou de biocharbon pour filtrer les effluents peut faire partie d’une solution écologique approuvée de gestion des émissions de nutriments.
Certaines plantes agissent comme des filtres naturels en extrayant les nutriments, divers agents pathogènes et d’autres éléments potentiellement nocifs des eaux s’écoulant dans le sous‑sol et en empêchant le ruissellement direct des effluents dans les cours d'eau. Les massettes (Typha), certaines espèces de fougères et le roseau commun, par exemple, ont été utilisés avec succès dans des applications de phytoremédiation (processus utilisant les plantes pour aider un écosystème à retourner à un état plus naturel).
Les chercheurs de la GSB les utilisent avec l'iris versicolore commun dans des essais comparatifs pour évaluer leur efficacité à prélever les nutriments dans les marais. Toutes les plantes ci‑dessus se propagent par des tiges souterraines ou « rhizomes ». Elles ont par conséquent la capacité de coloniser assez rapidement une zone à protéger ou dépolluer.
Ceux qui élèvent des carpes ou des poissons tropicaux connaissent la pertinence des filtres à charbon pour éliminer les impuretés de l’eau des aquariums. En tant qu’amendement pour le sol ou matière première de gestion environnementale, le biocharbon, charbon obtenu par combustion de biomasse (p. ex., de copeaux ou d’écorce de bois, voire même de fumier), a suscité un intérêt croissant au cours des dernières années. Une partie du travail de l'équipe de la GSB consiste à effectuer des tests de filtration avec du biocharbon pour réduire la quantité d’impuretés et d’agents pathogènes. Les chercheurs évaluent aussi le biocharbon comme amendement des sols biologiques contribuant à la qualité des fruits et à la résistance aux maladies et aux ravageurs des cultures.
Les producteurs qui envisagent d’effectuer une transition vers la production de tomates biologiques doivent être au courant des éventuels coûts indirects associés à cette transition et pouvoir déterminer les effets de ces coûts sur leur marge de profit. Par conséquent, les chercheurs de la GSB vont aussi comparer l’efficacité et la rentabilité de leur système de culture biologique à celles d'un système conventionnel. Ils espèrent proposer des solutions à la fois écologiques et efficaces quant aux coûts qu’elles représentent pour les producteurs, dans le but ultime d’approvisionner les Canadiens en tomates biologiques « locales ».
Cet article a été rédigé par Jodi DeLong pour le CABC grâce au soutien financier de la Grappe scientifique biologique du Canada (une partie de l’Initiative de grappes agro-scientifiques canadiennes du Cadre stratégique Cultivons l’avenir d’Agriculture et agroalimentaire Canada. La Grappe scientifique biologique est le fruit du travail de coopération accompli conjointement par le CABC, la Fédération biologique du Canada et les partenaires de l’industrie.